jeudi 23 août 2007

World Trip # 7: Malawi - Zambie (part VI)

August 1st - August 12th
Où en étais-je depuis la dernière fois ? Lilongwe, et tous les amis de Puncque qui m’ont escorté à travers les marchés tortueux, poisseux et infestés de mouches des abords de la ville pour m’aider à faire mes emplettes.
Puncque arrivait le soir même, en principe vers 19h.. qui se sont transformés par les aléas coutumiers du taxi brousse en passé minuit.

L’attente s’est faite en compagnie de ces mêmes amis aux surnoms qui rivalisent de bizarreries : Vitoumboko alias cheese on toasts, black seeds, sex and drugs, Joy and happiness, etc. ... et un de ses cousins, Jarvis, qui a grandi avec Puncque à l’époque où ils partageaient à 28 la petite maison familiale.

Son histoire m’a semblé familière, je l’ai déjà entendue malheureusement si souvent à travers le Malawi : orphelin de mère, abandonné à l’âge de 5 ans par son père, refugié au Malawi pour fuir la guerre civile au Mozambique mais qui retourne y vivre en laissant ses enfants derrière, mais pas sa nouvelle adresse...
Jarvis survit en vendant des T-shirts et bibelots de toutes sortes. La vente en rue aux Mzungus est interdite ; le jour même, la police lui avait confisqué l’équivalent de 3 mois de travail, tout à refaire, mais le plus extraordinaire est que cela n’avait pas le moins du monde entamé sa joie de vivre...

Les gens d’ici semblent tous accepter leur sort aussi désolant ou pénible soit-il avec une fatalité placide... on pourrait penser que c’est l’héritage du flegmatisme britannique, mais il semblerait que c’est davantage de la résignation, le constat lucide que les solutions sont hors de portée, et leur sort, le lot de quasi tous.

En tant qu’amie de Puncque, et donc leur « sister » d’adoption, tous refusaient de me laisser seule avant de s’assurer que Puncque soit là pour prendre la relève et veiller sur moi, me demandant toutes les 10 minutes avec une bienveillance étouffante si tout allait bien....

Ici, Mzungu seule parmi les locaux, ce serait presque le syndrome de la pauvre petite fille riche ; caractérisé par une saloperie d’auto-défense, manifestée elle-même par des a priori paranoïaques (parfois fondés, parfois pas, et c’est là que réside toute la difficulté) qu’on s’intéresse davantage à votre portefeuille qu’à votre petite personne. Le tout se balance entre agressivité exagérée (non, c’est pas parce que je suis blanche que je me dois de te donner tous mes Kwachas) et compassion frénétique (i.e : besoin utopique de sauver et aider tout le monde, enveloppé d’une immense tristesse et culpabilité ne pouvant à terme vous mener ailleurs qu’à une overdose de Prozac). Et jusqu’à présent, je dois dire que j’ai de la chance d’avoir des amis comme Puncque pour me remettre les pendules internes a l’heure....


Parmi mes compagnons d’un soir, il y avait Squeeze, le vendeur de Batik, à qui j’ai offert quelques verres pour le remercier d’attendre avec moi. Quand il m’a demandé pour un énième supplémentaire, je suis sortie de moi, lui arguant en m’énervant que je n‘étais pas sa mère, et que Mzungu ne veut pas dire $$. Il a disparu 10 minutes plus tard pour revenir avec un pain, du beurre et des tomates et m’a préparé à diner sur le brasero que le gardien de la banque d’à côté utilise pour se réchauffer... J’étais morte de honte. ‘’Sharing is caring » comme ils ont l’habitude de dire. Ici on s’enrichit autant en donnant qu’en recevant... J’ai encore des choses à apprendre, et c’est vraiment très difficile de détecter l’opportuniste du reste.

J’ai su aussi par la suite par un de ses copains que Squeeze habitait dans un village lointain de plusieurs dizaines de kilomètres, et qu’il avait volontairement raté son dernier bus pour s’assurer que je ne restais pas seule en attendant son ami d’école Puncque. Quand Puncque est enfin arrivé, je l’observais de loin mendier un lift aux riches Mzungus expats en 4X4 qui ne daignaient même pas lui répondre ne serait-ce que par un regard.

Les expats, il y en avait tout un attroupement au bar où l’on a passe la soirée... Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils ne donnaient pas vraiment envie d’être connus davantage...
Jetant avec dédain leurs liasses de Kwachas sur le comptoir pour qu’on leur serve au premier claquement de doigts leurs verres d’alcool qu’ils vomiront de toute façon quelques heures plus tard... Ils ont sans doute l’impression qu’ils se sont complètement intégrés lorsqu’ils abordent fièrement leur dreadlocks ou tresses africaines, qui sur la tête d’un Mzungu, les rendent encore plus ridicules.

De la bouche des filles, j’ai entendu des ‘’ You Malawians U’re all the same : fucking lazy and liars’’, de la bouche des garçons, et souvent des plus répugnants ‘’ Tonight, I’ll fuck a black woman !’’. Et des black women, il y en a.. dont une que j’avais remarqué car hyper classe dans son tailleur sobre et son air précieux. Je l’ai retrouvée en fin de soirée dans les toilettes, en train de danser autant complètement nue que défoncée sur Celebration des Kool and the gang... Une prostituée de plus... Des black boys, il y en a aussi à profusion inondant de compliments les Mzungus filles en espérant se faire offrir des verres gratos ou plus si affinités... On ne sait plus trop qui baise qui, au sens propre, mais surtout figuré au final de l’histoire, mais l’impression générale est sinistre, triste et vomitive au possible.


J’ai quitté Lilongwe pour la Zambie en bus, en 5 bus pour être exact ; rien n’est jamais simple en matière de transport. Un bus pour le village le plus près de la frontière, un autre pour atteindre le poste frontière, la frontière se traverse a pieds, ensuite encore un autre bus jusqu’au village suivant, etc etc. La destination finale était le campement en bordure du South Luangwa National Park. La toute dernière partie du trajet pouvait se faire à pieds, mais le campement avait été sans équivoque dans leur e-mail : ‘’jamais de la vie, beaucoup trop dangereux !!’’ Des voleurs prêts à vous égorger le long de la route ? Absolument pas, pire que ca ! Des dizaines d’éléphants traversant la route paisiblement, mais prêts à charger au moindre de vos gestes trop dérangeants, et plus rares aussi des hippos dont on dit qu’il est l’animal qui tue le plus de gens dans la région (moustique hors compétition).

Dans les bus, le moins que l’on puisse dire est que je me suis faite remarquer : dans le premier, un petit gosse qui hurlait à chaque fois que je le regardais : au secours, un monstre blanc! Ca avait le mérite de faire hurler de rire tout le monde. En Zambie, alors que je venais d’acheter du mais grillé à une petite fille, et non habituée à la monnaie locale, un passager me prévient qu’elle ne m’a pas rendu le change exact. Ca devient l’indignation générale, l’homme sort du bus, court après elle... Touchée de tant d’attention, mais aussi prise de pitié pour la petite vendeuse visiblement terrifiée à la vue d ‘un bus entier enragé contre elle, je lui ai finalement laissé la monnaie et acheté son stock entier d’épis de mais pour le partager avec mes comparses...

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Pendant le voyage, j’ai fait la connaissance de Grace, une petite Zambienne qui quittait son village pour la première fois, et qui louchait depuis le début du trajet sur le magazine que je lisais. Rien de bien extraordinaire, si ce n’est que c’est la première fois que je partage une conversation avec une fille locale. En général, elles se font discrètes, parlent souvent peu l’anglais (on n’investit pas dans l’éducation d’une fille, et pour celles qui vont à l’école ; on rapporte énormément de cas de filles abusées par leur professeurs sous-payés qui s’octroient eux-mêmes leurs avantages en nature). Comme j’ai souvent entendu dire sur un ton sarcastique ‘’ Men first, women fend for themselves’’.. pas vraiment besoin de plus amples explications...

Arrivée en Zambie, j’ai donc fêté mon anniversaire au milieu des éléphants qui m’empêchaient régulièrement de regagner ma tente ou d’en sortir, et au son des grommèlements des hippos somnolant dans la rivière d’en face. Puncque m’avait rejoint 1 jour plus tard avec un 4X4 et un couple d’Américains qu’il guidait. Il avait acheté de quoi cuisiner au brasero pour nos 4 jours sur place, et une bouteille de brandy locale pour trinquer à ma vieillesse.

Le lendemain, on n’avait déjà plus rien à manger.. les babouins étaient venu tout nous voler pendant la nuit.
Des animaux, il y en avait autant qu’on en voulait : girafes, zèbres, hippos, crocodiles, beaucoup, beaucoup d’éléphants, antilopes, léopards, lions.... Au début, c’est l’excitation quasi enfantine, à la fin, c’est quasi l’exaspération blasée : ‘’ oui, j’ai vu, un zèbre, et alors ?’’



Je prévoyais un séjour prolongé en Zambie, finalement, à la vue du coût de la vie sur place, mais aussi à la suite d’une confortable proposition de pouvoir rentrer gratuitement sur Lilongwe en 4X4, je suis revenue sur le Malawi. Et quand le douanier malawien a mis son cachet sur mon passeport, je me sentais presque de retour a la maison...


Ici, j’ai reçu mon nouveau surnom, Chiphaliwali, ca veut dire ‘’lightening’’ en Tonga, dialecte de la région de Nkhata Bay...
Joli, hein?


1 commentaire:

L'Ankou a dit…

Retour a la 'base', au Malawi alors ?! Et c'est koi la prochaine destination ??