samedi 3 octobre 2020

L'Europe #3: l'espoir

Nelson, mon petit cœur, mon ange, mon amour. Dans quelques années, peut-être même quelques mois, tu ne voudras plus que je t’appelle comme ça. Mais je m’en fous tu sais, je continuerai, après tout c’est mieux que mon petit poussin.

Tu m’en veux, je ne te parlerai pas de la mère complètement à la dérive que je suis, tout ça reste entre nous.

Je voudrais te parler du sujet que j’écris ici, parce que les autres je les écrirai sans doute ailleurs.

Nelson avant même que tu ne sois conçu, tu sais je suis partie. Loin. Je suis partie parce que tu sais rester ça veut dire regarder toujours les mêmes choses. Observer les mêmes choses, si on n’a pas d’autres repères, on les comprends pas forcément.

Nelson, je ne vais pas te faire de grands discours parce que ce qui m’a fait partir finalement n’appartient qu’à moi. Ce que ça m’a fait découvrir ce sont de très belles choses, des choses terribles, des choses tristes, des magnifiques rencontres, des rires, des tristesses, des joies, une autre façon de vivre.

Il a fallu m’adapter. De nombreuses fois, il a fallu que je change de stratégie, que je pense autrement. Je n’étais qu’une étrangère. J’avais tout à repenser, tout à apprendre. Et Nelson, c’était ça qui était magnifique ! Tu te rends compte, c’était comme si chaque jour tu te réveillais et le monde était à repenser, à le découvrir, tant de belles choses m’attendaient. Tu me dis toi-même pourquoi c’est toujours les mêmes scénarios ?

Ça pourrait faire peur à beaucoup de monde. Moi j’ai pas eu peur. Tu sais Nelson, si on part avec de la bienveillance les portes elles s’ouvrent. Non je ne te dis pas qu’ont vit dans un monde de bisounours, je te dis que quand on tend la main, on ne va pas forcément trouver la morsure. Je n’arrive pas à trouver les mots Nelson tant cette année elle a été intense.

Ce que je peux dire Nelson, c’est que de nombreuses fois je me suis retrouvée dans la misère, la misère de trouver un endroit où manger, un endroit où dormir, un endroit où trouver un bus. Et tu sais quoi Nelson ? Il y avait toujours une personne pour m’aider. Si je peux retenir une chose, c’est cette magie. Je ne pourrai pas l’expliquer, Pourquoi cette personne m’a aidé à ce moment-là ?

Pourquoi moi ? Je pourrais te dire que j’avais un ange gardien, je pourrais te dire que c’est la volonté de Dieu ou n’importe quelle autre connerie. Non Nelson, ce sont des personnes comme toi et moi qui ont juste vu une autre personne comme elle qui avait besoin d’aide.

J’ai campé dans le jardin d’un hôtel au Malawi parce que c’était tout ce que ces personnes pouvaient m’offrir, j’ai dormi dans leur canapé, j’ai même dormi dans les containers des casques bleus australiens au Timor Leste. J’ai dormi sur le toit d’un bus avec un gars qui me retenait pour ne pas que je tombe. J’ai dormi avec des moines tibétains au Népal, dans leur tente. J’ai dormi en plein milieu du désert au nord de l’Inde avec des dromadaires, j’ai dormi dehors en Zambie avec des singes et des éléphants qui étaient menaçants. J’ai dormi à plus de dix dans un lit de deux avec une grand-mère de plus de nonante ans en Afrique, parce que de toutes façons, c’est comme ça qu’on dort. J’ai dormi dans des bus sur des kilos d’oignons avec des chèvres qui essayaient de me mordre, j’ai dormi avec des poules que j’allais manger le lendemain.  

Je ne me souviens même plus Nelson, Si je cherche, je pourrai en trouver d’autres, mais ce dont je me souviens, c’est que toutes ces personnes qui m’ont permis de dormir, m’ont tendu la main au moment où j’en avais besoin, sans jamais rien me demander en échange. Si en fait, toujours le café ou le thé au matin avec un grand sourire. Je ne parlais même pas leur langue pour leur dire merci. Mais un merci tu sais, ça passe par le regard. C’est pas si compliqué qu’on pourrait le croire.

Nelson j’ai eu la naïveté de croire que le monde c’est comme ça qu’il tournait. Maintenant, j’ai la certitude que c’est comme ça qu’il devrait tourner. Ne me l’enlève pas. Dans quel monde tu veux vivre ?

Moi j’ai fini mon voyage depuis longtemps, je suis revenue dans ce monde d’égoïstes. Et merde, Nelson, il est pas beau. Il est pas beau, mais il sera ce qu’on en fait. Des mains tu en as deux, tends en une, juste une seule. Et si on multiplie ça par le nombre de personnes qui feront l’effort, tu verras, je te le promets, le monde se parera de milles couleurs.

 

 

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